Où la célébration de la femme moderne…en 1920.
Réalisateur : Deb Cox et Fiona Eagger
Année : 2012-2015
Producteur : Every Cloud Production
Diffuseur : ABC1
Acteurs principaux : Essie Davis, Nathan Page, Hugo Johnstone Burt, Ashleigh Cummings
Durée d’un épisode :60 minutes
Nombre de saisons : 3 (série en cours)
- saison 1 (13 épisodes)
- saison 2 (13 épisodes)
- saison 3 (8 épisodes)
Résumé : Australie, années 1920, Phryne Fisher revient au pays pour faire avouer l’assassin de sa soeur, déjà condamné mais réfutant toute implication dans l’affaire. Devant l’enquête qui piétine, Miss Fisher décide de se lancer comme détective privée et d’offrir ses services à ceux sont dans le même cas qu’elle. Elle sera assistée pour cela de Dorothy (Dot) sa dame de compagnie, et de Cécil (Cec) et Bert, deux chauffeurs de taxi communistes. Au hasard de ses enquêtes, elle se mêlera surtout de celles du charmant (mais marié) inspecteur Robinson qui en pince pour elle, et de son adjoint l’officier Hugues.
Notre avis :
Miss Fisher, une femme libérée
Phryne Fisher incarne la femme des années 1920 : sachant se libérer des hommes, prônant l’égalité entre les sexes, indépendante financièrement. Bref, une féministe issue de la première vague.
Dès le premier épisode, le ton est donné : Phryne est une croqueuse d’hommes ! Et essaime ses conquêtes au fil des épisodes avant de tomber sur la perle. Au grand dam de Dot, sa femme de compagnie pour qui, en plus de fréquenter les hommes de cette manière, pense que prendre la pilule est contre-nature.
C’est aussi une aventurière. En plus de son métier de détective, elle se revendique automobiliste, aviatrice, sait se défendre et tirer au pistolet, et n’a pas peur d’escalader les toits pour jouer les cambrioleuses…
Pour finir, elle est surtout philanthrope : n’oubliant pas les autres femmes qui n’ont pas eu sa chance ou son courage, elle finance des actions en leur faveur : club de course automobile féminin, bourse éducative féminine dans plusieurs domaines. Elle a pris sous son aile une dame de compagnie un peu dévote, Dot, qu’elle ouvre à d’autres possibilités que le mariage, et a adopté Jane, une orpheline enrôlée dans une bande de cambrioleurs.
Cependant, au fil des épisodes elle se heurte souvent à des messieurs sceptiques envers son métier et son attitude, tout comme sa tante Prudence, aristocrate très conservatrice.
Gommer les différences de classe
Tout au long de la série, on sent les différences de classe à plusieurs niveaux.
L’opposition est présente dès le départ au niveau des religions catholiques et protestantes, à travers les personnages de Dot et Hugues.
Tout d’abord réticents à entamer une relation ensemble car issus de confessions différentes, ils décident de braver leurs familles et leur religion par amour. Mais cela ne va pas sans heurts.
La distinction est aussi palpable au niveau des revenus, avec la Haute société et le Peuple.
Prudence, la tante de Miss Fisher représente le monde des privilégiés, vivant de ses rentes, méprisant le bas-peuple, coincée dans la bienséance de son rang. Cécil et Bert incarnent le Peuple de leur côté, qui doit travailler pour vivre et revendiquer ses droits.
Miss Fisher gomme ces deux classes en mettant en avant un concept simple : on est ce que l’on fait. En cela, elle se distingue par ses actions et non par son milieu d’origine, ce qui lui vaut le respect des deux chauffeurs de taxi, mais des remontrances de la part de Prudence.
L’Australie après la Première guerre mondiale
A travers la série, c’est l’Histoire des années 20 en Australie que l’on découvre.
A cette époque, les hommes revenus de la Guerre ont été profondément marqués par ce qu’ils ont vu ou vécu. Dans les premiers épisodes de la série, Phryne évoque son passé d’infirmière sur le front. Dans l’épisode 7 saison 1 (Meurtre à Montparnasse), à travers le vol d’un tableau ayant appartenu à Miss Fisher, on découvre le passé de Cec et Bert pendant la guerre. Dans l’épisode 3 saison 1 (La musique du diable), on apprend le retour d’un soldat tombé au front, qui se cachait à cause d’une infirmité. Enfin, dans l’épisode 2 saison 2 (Esprit es-tu là?), on revit l’enfer des tranchées avec un soldat hanté par son passé qui demande conseil auprès d’une voyante.
Les séquelles de la guerre sont présents au quotidien et apportent une sorte de morosité aux australiens. Cette morosité est combattue à travers les cabarets, la musique Jazz et la cigarette, autre sujet abordé dans la série dans l’épisode 3 saison 1 (La musique du diable). Il faut célébrer la vie et combattre les ombres du passé en s’amusant…ce que sait très bien faire Miss Fisher.
L’histoire du parti travailliste est aussi abordé avec les personnages de Cec et Bert qui sont communistes. Cela leur vaut de nombreux désagréments avec la police, jusqu’à ce qu’ils rencontrent l’inspecteur Robinson. L’épisode 4 saison 1 traite de la lutte de la police contre les émeutes du parti travailliste qui souhaite des salaires équitables et des droits pour les ouvriers. L’épisode 10 saison 1 (Machinations) traite des conditions de travail dans les usines pour les femmes.
L’accent est mis sur les arts et leur évolution dans plusieurs épisodes (Peinture, cinéma, mode) et surtout l’Art déco, qui est à l’honneur dans la série dans
les costumes et les décors. La mode est à la femme à la peau très claire, féminine et élégante ce que Miss Fisher incarne parfaitement.
D’autres sujets sont traités encore : les séances de spiritisme (très en vogue à l’époque), la ségrégation raciale (les mariages mixtes, les aborigènes), la contrebande d’alcool, les vignobles australiens, la ruée vers l’or.
En conclusion : Une très bonne série qui allie humour, charme, enquête et Histoire de façon subtile. Si vous ne la regardez pas pour les enquêtes, intéressez-vous au moins au détail de reconstitution dans les costumes qui sont époustouflants.
Pour aller plus loin :
Le site d’ABC One propose une partie consacrée à Miss Fisher avec des galleries de photos, des outils pédagogiques en anglais pour l’étudier en classe, des fiches personnages, des actus. Malheureusement, les vidéos bonus de la série sur ce site ne peuvent être visionnées que si vous habitez l’Australie…
La page Wikipedia de la série récapitule de nombreuses informations en français.
Une exposition sur la série et ses costumes est organisée en Australie du 15 juillet au 4 septembre 2016. Au programme : des conférences autour des thèmes abordés dans la série et la mode des années 20, atelier de DIY, concert de Jazz…
Marion Boyce, la costumière de la série a reçu un prix pour ses créations. Vous pouvez consulter son travail ici.
Une boutique est dédiée à la série pour se créer une tenue digne de la célèbre détective.
Vous pouvez également consulter notre article sur la décoration steampunk qui fait référence à l’art déco afin de trouver du mobilier dans le ton de l’époque.
Si vous souhaitez acheter les dvd de la série, c’est ici.
Sinon, vous pouvez aussi les regarder sur Netflix où sont disponibles les deux premières saisons.
La série est issue initialement des romans policiers de l’auteur australienne Kerry Greenwood qui continue encore d’écrire les aventures de Miss Fisher, à côté de la série.